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1 - Les raisons politiques d’institution d’une Caisse gersoise



                 Le 3 octobre 1936, plusieurs personnalités locales, représentantes du monde agricole gersois, se
           réunissent à la Maison de l’agriculture, située 9 rue Gambetta à Auch. La Chambre d’Agriculture compte
           trois représentants à cette réunion : son président, Lagravère, et deux autres membres, Délieux et Mau-
           peu.
                 Vient ensuite la Société de l’Agriculture, représentée par son président, Bernès et par cinq membres
           de son conseil d’administration : Bordes, Bonnaventure, Vivent, Lacoste, Saint-Martin. Tournan, séna-
           teur du Gers et président de la Mutuelle Incendie de Gascogne est lui aussi présent. Labatut, président
           de la Fédération des Syndicats de Défense paysanne fait partie de l’assemblée. Le président du Syndi-
           cat d’électrification du canton d’Auch-Nord, Saint-Pé, compte parmi les personnalités.

                 Sont aussi présents les président des coopératives de blé de Marciac, de Cazaubon, de Saint-
           Sauvy ; des coopératives de Luppé-Violles, des Deux-Baïses à l’Isle-de-Noé et du directeur de la coopé-
           rative des silos vicois . Enfin, l’assemblée est composée de Descomps, président de la Caisse locale de
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           Mas-d’Auvignon, de Lasglevzes, administrateur de la Caisse Régionale de Crédit Agricole et de « divers
           propriétaires utilisant régulièrement de la main d’œuvre agricole » .
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                 L’objet de cette réunion est la création d’une Caisse Agricole Départementale d’Allocations Fami-
           liales. Cette décision répond à un double objectif d’indépendance vis-à-vis des caisses concurrentes et
           de monopole sur le département. En effet et comme le note Ludovic Azéma, « dans les années 1930, il
           y a une véritable concurrence entre les caisses pour posséder un grand nombre d’adhérents à travers
           une véritable ‘‘chasse aux adhérents’’ » .
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                    « C’est sous les auspices de la Chambre d’Agriculture du Gers, que les représentants des
           grandes associations agricoles furent en 1936, convoqués en réunion, pour étudier l’institution des
           Allocations Familiales Agricoles dans notre département » . Tardos, secrétaire de la Société d’Agricul-
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           ture, expose les raisons pour lesquelles cette caisse doit absolument être créée à Auch. Il invoque le
           décret du 5 août 1936 qui étend aux salariés des exploitants agricoles la loi du 11 mars 1932 sur les allo-
           cations familiales. Il remarque que les départements limitrophes ont déjà mis en place une telle caisse :
           « nos voisins, ajoute-t-il, nous ont déjà devancés. Des caisses régionales d’allocations familiales ont été
           créées à Pau, Toulouse, Agen ».

                    Ce sont les Caisses de Pau, Toulouse et Agen qui assurent, jusqu’à présent, le versement des
           allocations familiales dans le Gers. Leur compétence ratione loci dépasse donc le seul cadre de leur
           département. Or, c’est un problème ! En effet, c’est parce qu’elles sont compétentes qu’il est impératif
           de créer, dans le département, une Caisse gersoise. Tardos l’explique très bien. Il affirme que « chacune
           de ces trois caisses a compris le Gers dans sa circonscription comme si les agriculteurs de notre dépar-
           tement étaient incapables de s’administrer eux-mêmes » . Il voit donc comme une insulte cette prise de
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           contrôle extérieure sur le département. Toutes les personnalités présentes partagent cet avis. Ils sous-
           crivent tous aux propos suivant tenus par Tardos : « nous prouverons le contraire en créant aujourd’hui
           notre propre caisse. Nous la créerons sous le régime de la mutualité ».
                    C’est donc une volonté d’une Caisse souveraine dans son département qui anime cette réu-
           nion. Une caisse étrangère n’a pas à s’immiscer dans les affaires gersoises.
                    Ceci n’est pas sans rappeler les travaux de Bordes sur l’intendance d’Auch.




           31  Respectivement Luro, Rendu, Masson, Dabat, Fouriès. Un autre président, de coopérative, Dat, est présent. Les procès-
           verbaux ne l’identifient toutefois pas.
           32  PV de la séance de la Caisse Agricole Départementale d’Allocations Familiales, 3 octobre 1936.
           33  AZÉMA (Ludovic), op. cit.,1ère partie, p. 10.
           34  PV de l’Assemblée Générale de la C.A.D.A.F. du 13 septembre 1943.
           35  PV de la séance de la C.A.D.A.F., 3 octobre 1936.





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